La Contemplation du monde – Figures du style communautaire (1993) de Michel Maffesoli
Le courant du post-modernisme en sciences sociales souffre et bénéficie de l’impopularité qu’impliquent le manque de rigueur et le caractère spéculatif de sa réflexion. L’enthousiasme et l’animosité semblent se cristalliser particulièrement autour de la personne de Michel Maffessoli, et ce depuis qu’il a dirigé la thèse d’Elisabeth Teissier, célèbre astrologue pour média populaires, à peine sobrement intitulée « Situation épistémologique de l'astrologie à travers l'ambivalence fascination-rejet dans les sociétés postmodernes » (lire en particulier l'article suivant : LE MAFFESOLISME, UNE « SOCIOLOGIE » EN ROUE LIBRE. DÉMONSTRATION PAR L’ABSURDE).
Trêve de ragots : Michel Maffessoli, qu'avez-vous dans le ventre ? De très gros yeux, sans doute, puisque le postmodernisme se veut critique et réhabilitation de la tradition philosophique rationnelle classique. Rien que ça. Et cependant, la Contemplation du monde, ouvrage pourtant à peine daté de deux décennies, ne résistera pas aux moyens de ses propres armes. Les objections de sa critique semblent en effet plus moisies que les idées qu'il prétend rénover d'un coup de peinture fraîche. Les libérateurs ont souvent cette fâcheuse tendance à vouloir remplacer les anciennes figures tutélaires par eux-mêmes.
L'ouvrage part de la considération suivante :
« Progressivement, l’imaginaire, que la modernité pouvait considérer comme étant de l’ordre du superflu ou de la frivolité, tend à retrouver une place de choix dans la vie sociale. »
Là où les phénomènes ne surviennent pas, Michel Maffessoli les invente. Le post-modernisme s’apparente alors au discours de celui qui, pour se donner du grain à moudre, semble avoir choisi arbitrairement un morceau de paille pour en faire une poutre. Le flou sémantique régnant autour des notions utilisées permet au sociologue une diversité d'interprétations, et donc une plus dense logorrhée. De quel imaginaire parlons-nous ? De quelle façon cet imaginaire a-t-il pris une place plus importante ? Nous ne sommes jamais certains d'avancer sur une piste concrète, surtout lorsque M.M. ajoute : « Bien sûr je force le trait. Comme souvent, je propose l’analyse d’un paroxysme ».
« Progressivement, l’imaginaire, que la modernité pouvait considérer comme étant de l’ordre du superflu ou de la frivolité, tend à retrouver une place de choix dans la vie sociale. »
Là où les phénomènes ne surviennent pas, Michel Maffessoli les invente. Le post-modernisme s’apparente alors au discours de celui qui, pour se donner du grain à moudre, semble avoir choisi arbitrairement un morceau de paille pour en faire une poutre. Le flou sémantique régnant autour des notions utilisées permet au sociologue une diversité d'interprétations, et donc une plus dense logorrhée. De quel imaginaire parlons-nous ? De quelle façon cet imaginaire a-t-il pris une place plus importante ? Nous ne sommes jamais certains d'avancer sur une piste concrète, surtout lorsque M.M. ajoute : « Bien sûr je force le trait. Comme souvent, je propose l’analyse d’un paroxysme ».
Catégorie fourre-tout, le post-modernisme est également décrit comme « reprise d’éléments pré-modernes qui sont utilisés et vécus d’une manière différente ». Pour se passer de la prémodernité, encore faudrait-il être capable de s'en servir. « Je pense en particulier à la Grèce ancienne qui fit de la culture de soi le pivot de l’organisation de la cité. N’étant pas spécialiste en la matière, je fais uniquement une référence métaphorique, référence ayant pour but d’éclairer le temps présent ».
Bien qu’il comporte presque 200 pages, la Contemplation du monde pourrait se limiter à sa préface. Tout y est déjà dit (« J’entends […] établir un simple constat : reconnaître la profusion, le rôle et la prégnance de l’image dans la vie sociale »). La méthode de recherche s'apparente à exacerber, dans les phénomènes sociétaux, les preuves d'un fantasme personnel transformé par hasard en hypothèse de travail, sans que nous soyons vraiment informés de la genèse de celle-ci (un sentiment ?)
"L’image est consommée, collectivement, ici et maintenant. Elle sert de facteur d’agrégation, elle permet de percevoir le monde et non de le représenter. Et même si on peut la récupérer d’un point de vue politique, elle a surtout une fonction mythologique : elle favorise le mystère, c’est-à-dire des initiés entre eux ».
Nous comprenons ainsi progressivement que l'exaltation moderne de l'imaginaire concerne essentiellement le monde du divertissement médiatique. L'imaginaire n'est plus une activité intellectuelle qui, adéquatement orientée, permet de percevoir l'image de l'essence des choses. Elle n'est plus même simple fantaisie imaginante qui se nourrit des images issues de la perception. Elle est absorption d'images fabriquées par une industrie visant à l'abrutissement des masses. Elle peut certes constituer, comme le note M.M. avec un optimisme frisant la bêtise, un "facteur d'agrégation" en ce sens qu'elle uniformise chaque être dans l'indifférenciation du désir marchand. Voir ressusciter du mystère dans la fascination que créent ces instruments d'emprise psychique n'est qu'une trahison supplémentaire que la modernité prétentieuse assène à la tradition.La contemplation du monde ne serait-elle qu’un plaidoyer pour l’acception sereine de la propagande ?
Craignez les idéologues qui, persuadés de leurs bonnes intentions, agissent en faveur d'actes mauvais en soi.
Commentaires
Enregistrer un commentaire